dimanche 28 février 2016

Le corbeau croasse encore, et moi ?

Pour continuer sur la lancée de mon billet de dimanche dernier sur le corbeau, deux pistes se sont ouvertes cette semaine.
Mais tout d'abord, les fleurs de printemps qui profitent du soleil, mais luttent contre le froid:

Elles étaient sorties déjà le 14 février, courageuses et téméraires, même si elles n'ont pas eu à percer la neige :


Perce-neige - Photo : lfdd

D'abord, dès le lundi soir, un nouveau hasard étrange a ressuscité le corbeau. Vous n'allez pas le croire, mais à 19h00, lorsque je je sors dans la cour dans l'obscurité, au loin, j'entends une nuée de corbeaux sur un arbre, croassant de conserve, écho de mon billet de la veille? Et tout à coup, passant dans la nuit au-dessus de moi, un corbeau solitaire qui croasse et se pose sur le toit voisin en continuant son concert .... Que voulait-il me dire?

Le lendemain, allant dans une de mes librairies favorites, face à la caisse, je vois en couverture d'un livre.... un corbeau...
J'achète le livre "La douleur porte un costume de plumes" de Max Porter, dont voici un extrait - le livre donne la parole au père aux deux enfants et au corbeau: 
"CORBEAU
Très romantique, notre première fois. gros malpoli. Croche-piège. Deux chambres à l'étage, duplette, petite erreur effilée, faufile facile dans le mur direction grenier pour voir les deux petits cotonneux dormir sans bruit, ronron enivrant des enfants innocents, ouate, attaque, crac-tac-plac, toute la chambre étouffait sous le deuil, chaque surface Maman morte, chaque feutre, tracteur, manteau, botte, tout couvert d’une pellicule de douleur."

Trois jours après, un article dans Le Monde en parle ainsi:
"C’est un livre à l’image de son personnage principal : un corbeau. Un livre noir et drôle. Ebouriffé, insolent, clownesque, déroutant, poignant, comique, métaphorique, ouvrant ses ailes et sautillant dans toutes les directions. Un livre qui peut faire « kraaa » ou « kron kron kron », parce qu’il ne s’interdit aucune forme d’onomatopée ou d’effet poétique. Qu’il mélange les genres. Qu’il s’amuse même parfois à dérouler verticalement des sortes de calligrammes bizarres, légers et aériens comme des guirlandes de plumes. Bref, c’est un livre qui est là où on ne l’attend pas, comme un oiseau de malheur dont on ne comprend absolument pas comment il a pu rentrer dans la maison."

Le livre fait un parallèle avec Ted Hughes, qui a écrit un livre "Crow" - Le corbeau et dont la femme Sylvia Plath, s'est suicidée.
et dont voici un extrait:

"Qui possède ces petits pieds décharnés ? La mort.
Qui possède ce visage hérissé, comme brûlé ? La mort. 
Qui possède ces poumons qui fonctionnent encore ? La mort. 
Qui possède ce manteau de muscle utilitaire ? La mort. 
Qui possède ces tripes inqualifiables ? La mort. 
Qui possède ce cerveau douteux ? La mort. 
Tout ce sang malpropre ? La mort. 
Ces yeux si peu efficaces ? La mort. 
Cette méchante petite langue ? La mort. 
Cette insomnie intermittente ? La mort.

Donné, volé, ou réservé en attendant le jugement ?
Réservé.

Qui possède toute la terre pierreuse, pluvieuse ? La mort. 
Qui possède tout l’espace ? La mort.

Qui est plus fort que l’espoir ? La mort.
Qui est plus fort que la volonté ? La mort. 
Plus fort que l’amour ? La mort. 
Plus fort que la vie ? La mort.

Mais qui est plus fort que la mort ?
Moi, évidemment.

Admis, Corbeau."


Crocus - Photo: lfdd

D'autre parallèles peuvent être faits avec le livre de Edgar Allan Poe qui a aussi écrit "Le corbeau" illustré par entre autres Edouard Manet et qui commence curieusement aussi - ou plutôt l'inverse - ainsi:
«Une fois, sur le minuit lugubre, pendant que je méditais, faible et fatigué, sur maint précieux et curieux volume d’une doctrine oubliée, pendant que je donnais de la tête, presque assoupi, soudain il se fit un tapotement, comme de quelqu’un frappant doucement, frappant à la porte de ma chambre. « C’est quelque visiteur, — murmurai-je, — qui frappe à la porte de ma chambre ; ce n’est que cela, et rien de plus.»


Edouard Manet - Le Corbeau

Revenons à nos fleurs pour finir avec les nivéoles de printemps et finissons en chanson.


Nivéoles - Photo: lfdd

D'abord la version de Léo Ferré qui chante d'Arthur Rimbaud "Les Corbeaux":




"Seigneur, quand froide est la prairie,
Quand, dans les hameaux abattus,
Les longs angélus se sont tus...
Sur la nature défleurie
Faites s'abattre des grands cieux
Les chers corbeaux délicieux.

Armée étrange aux cris sévères,
Les vents froids attaquent vos nids !
Vous, le long des fleuves jaunis,
Sur les routes aux vieux calvaires,
Sur les fossés et sur les trous
Dispersez-vous, ralliez-vous !

Par milliers, sur les champs de France,
Où dorment des morts d'avant-hier,
Tournoyez, n'est-ce pas, l'hiver,
Pour que chaque passant repense !
Sois donc le crieur du devoir,
Ô notre funèbre oiseau noir !

Mais, saints du ciel en haut du chêne,
Mât perdu dans le soir charmé,
Laissez les fauvettes de mai
Pour ceux qu'au fond du bois enchaîne,
Dans l'herbe d'où l'on ne peut fuir,
La défaite sans avenir."
Arthur Rimbaud


Il y a aussi une chanson de Gilles Vigneault chanté ici par Pauline Julien en 1966: "Les Corbeaux"

Pauline Julien - Les corbeaux (de Vigneault)



Et une plus connue, celle de Claude Nougaro, "Je Crois

Je Crois
"Le corbeau croasse 
Et l'herbe croit 
Le crapaud coasse 
Et moi je crois
J'ai pas d'apôtre
J'ai pas de croix
Je crois en l'autre
Je crois en moi"





Et pour faire plaisir à un (très) fidèle lecteur, j'ai déniché une chanson de Julos Beaucarne: "Les Deux Corbeaux", mais elle n'est disponible qu'en ligne (ou sur son disque: "Bornes acoustiques")
http://redmp3.cc/4551452/julos-beaucarne-les-deux-corbeaux.html


Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche

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