vendredi 28 avril 2017

Seuls et (ses) Soeurs: De la geste familiale d'aujourd'hui au grand show contemporain

Wajdi Mouawad est un créateur et un personnage multiple et plein de ressources. Comme le dit Wikipédia: "homme de théâtre, metteur en scène, auteur, comédien, directeur artistique, plasticien et cinéaste libano-canadien". Cette dernière précision, même s'il est maintenant en France - où il a également passé une partie de sa jeunesse et où il dirige aujourd'hui le Théâtre National de la Colline à Paris (autre "métier" non encore répertorié par l'encyclopédie du net) marque très fortement son oeuvre. Son théâtre, entre autres son cycle "Le sang des Promesses" dont on a vu l'année dernière au TNS "Incendies" est marqué par son destin personnel et l'exil. 
Actuellement au Théâtre du Maillon à Strasbourg, nous pouvons assister à deux pièces, début d'un autre cycle "Domestique" qui va raconter son histoire familiale sous forme de portraits de famille.


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron


Seuls

Premier opus de la série de cinq à venir (voir Soeurs plus bas), Seuls est un portrait intime, domestique en même temps qu'onirique de la trajectoire d'un exilé qui a perdu ses racines (son jardin dans la montagne au Liban, seul souvenir qu'il a gardé du pays) et balance entre sa famille et son activité professionnelle (une thèse sur un metteur en scène de théâtre - Robert Lepage - qui devrait l'amener à devenir professeur d'université). 


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron


Démarrant par des scènes prosaïques d'une grande sobriété (échanges téléphoniques du quotidien avec père, soeur et professeur), la pièce va creuser l'intime et les relations familiales (les habitudes, les situations bloquées, le besoin de reconnaissance et de considération) et interroger également le parcours professionnel (les métiers rêvés ou choisis) et la création artistique sur des terrains qui se répondent mutuellement: le rapport au père et l'amour (le vrai père encore vivant, mais jusqu'à quand?), les pères (pairs) vivants ou morts qui déterminent la carrière à venir et le père symbolique (celui du tableau de Rembrandt "Le retour du fils prodigue" - et de la bible -Luc 15-21). La pièce, qui oscille entre fiction et autobiographie (avec la constatation de l'auteur qui l'écrit que, dans la réalité, pour la vie "Le brouillon, c'est le propre") finit, après une scène digne des meilleures séances de "stand up", dans un silence créatif et explosif. 


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron

A vous d'aller le voir...




Soeurs

Alors que "Seuls" (au pluriel) parle de la pluralité des facettes du personnage principal (le narrateur, l'auteur, le comédien, le fils !), "Soeurs" construit un dialogue entre deux personnages qui pourraient être les deux soeurs de l'auteur, celle de la vie, l'exilée (Nayla Mouawad), et celle du théâtre, celle qui est dans la puissance du langage et du jeu (Annick Bergeron, l'interprète). 


Soeurs - Madji Mouawad - Le Maillon -© Pascal Gély


Cette puissance montrée à travers ses différentes facettes (chanson, négociation, imagination, quotidien, modernité et dématérialisation) traverse des moments d'émotion, de relation, d'interrogation dans une mise en scène imaginative et contemporaine (comme d'ailleurs "Seuls"). La pièce nous parle du monde dans lequel nous vivons, que ce soit des problèmes de politique internationale ou de la déshumanisation des rapports du quotidien. Il touche aussi les questions d'identité, d'exil - même dans son propre pays - et des relations humaines et familiales (l'amour - ou son absence, la reconnaissance, les mots si simples à dire comme merci et que l'on oublie de transmettre,..).


Soeurs - Madji Mouawad - Le Maillon -© Pascal Gély


Annick Bergeron nous rend tout cela très proche et émouvant. Et la mise en scène et la scénographie nous réservent quelques surprises qui arrivent à nous transporter dans des situations (la guerre) que nous ne pensions pas trouver dans ce spectacle. 
Alors, à la question "Qui pourrait croire que l'hiver finirait un jour?" la pièce répond par le bleu du ciel qui suffit à nous faire notre habit de marin. Et nous embarquons volontiers pour la croisière...


Wajdi Mouawad est un conteur hors pair qui arrive à nous transporter dans le domaine du coeur et de la sensibilité avec ses histoires touchantes et émouvantes, avec de moyens très simples quelquefois mais aussi avec tous les médias et les techniques et technologies d'aujourd'hui: Le trouvère du XXIème siècle.

Bons Spectacles

La Fleur du Dimanche


Seuls

Au Maillon à Strasbourg
du 27 au 29 avril

Texte, mise en scène et jeu : Wajdi Mouawad
Dramaturgie, écriture de thèse : Charlotte Farcet
Conseiller artistique : François Ismert
Assistance à la mise en scène : Irène Afker
Scénographie : Emmanuel Clolus
Lumière : Éric Champoux
Costumes : Isabelle Larivière
Réalisation sonore : Michel Maurer
Musique originale : Michael Jon Fink
Réalisation vidéo : Dominique Daviet
Construction du décor : François Corbal, Éric Terrien, Yann Malik, Sébastien Grangereau et Benjamin Leroy Sorrin des ateliers du Grand T à Nantes
Générique additif, voix : Nayla Mouawad, Michel Maurer, Isabelle Larivière, Robert Lepage, Abdo Mouawad, Éric Champoux
Musiques additionnelles : Al Gondol de Mohamed Abd-Em-Wahab, Habaytak de Fayrouz, Una furtiva lacrima de Donizetti par Caruso
Texte additionnel : Le Retour du fils prodigue, Luc 15-21, tiré de la traduction de la Bible de Jérusalem
Production : La Colline, Théâtre national / Au Carré de l’Hypoténuse-France & Abé Carré Cé Carré-Québec - compagnies de création / Espace Malraux, Scène nationale de Chambéry et de la Savoie / Grand T théâtre De Loire -Atlantique / Théâtre 71, Scène nationale de Malakoff / Comédie de Clermont-Ferrand, Scène nationale / Théâtre National de Toulouse Midi-Pyrénées / Théâtre d’Aujourd’hui, Montréal / Le Manège, Mons
Remerciements particuliers : Patrick Le Mauff, Robert Lepage, Nayla Mouawad, Abdo Mouawad, Marie-Eve Perron, Alain Roy Remerciements : Lynda Beaulieu, Marie Gignac et le Carrefour International de Théâtre de Québec, Pr. Jean-Pierre Farcet, Dr. Hassan Hosseini neurologue, Georges Banu, Jean-François Dusigne, Marcel Martin, Rose Dibilio ; aux équipes du Théâtre national de Toulouse, du Grand T à Nantes et de l’Espace Malraux, Scène nationale de Chambéry et de la Savoie pour le travail accompli au cours des répétitions

Seuls, chemin, texte et peinture est publié aux : éditions Leméac/ Actes Sud-Papiers

Soeurs

Au Maillon à Strasbourg
du 25 au 29 avril

exte et mise en scène : Wajdi Mouawad
Inspiré par : Annick Bergeron, Nayla Mouawad
Interprétation : Annick Bergeron
Dramaturgie : Charlotte Farcet
Assistance à la mise en scène : Alain Roy
Scénographie et dessins : Emmanuel Clolus
Lumière : Éric Champoux
Assisté de : Éric Le Brec’h
Costumes : Emmanuelle Thomas
Conception et réalisation vidéo : Wajdi Mouawad, Dominique Daviet
Direction musicale : Christelle Franca
Composition : David Drury
Réalisation sonore : Michel Maurer
Maquillages : Angelo Barsetti
Avec le concours de : équipe technique du Grand T
Décor construit aux : Ateliers du Grand T
Avec les voix de : Annick Bergeron, Christelle Franca, Aimée Mouawad, Wajdi Mouawad
Musiques additionnelles : Je ne suis qu’une chanson de Ginette Reno, Saat Saat de Sabah, Étude Op. 76 nr2 de Jean Sibélius
Production : La Colline, Théâtre national
Coproduction : Au Carré de l’Hypoténuse-France & Abé Carré Cé Carré-Québec - compagnies de création / Grand T, théâtre de Loire-Atlantique / Théâtre national de Chaillot, Paris / Théâtre de l’Archipel, Scène nationale de Perpignan / Quartz, Scène nationale de Brest
Résidences de création : Athanor, Ville de Guérande / Grand T, Nantes
Remerciements : Deirdre Bergeron, Léandre Bergeron, Mylène Chabrol, Eveline Desharnais, François Douan, Sylvie Fradet, Abdo Mouawad, Louise Otis, Marie-Eve Perron, Jean- Claude Retailleau, Baptiste Vrignaud

Soeurs est publié aux : Éditions Leméac Actes Sud-Papiers

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